Les chroniques et histoires anciennes

Au rendez - vous de la légende Alsacienne du moyen âge à nos jours

LE VENITIEN DU LACHTELWEIHER

Chaque année, le printemps venu, un vieux Vénitien fort riche avait pour habitude de se manifester sur les rives de ce lac. On le reconnaissait à ses somptueux vêtements et à sa barbe blanche. Mais dès qu'il se sentait observé, le vieillard regagnait le couvert du Stosswald, une forêt domi- nant Kirchberg, et y disparaissait. Mais il advint un jour que le fils d'un paysan parvint à suivre le mystérieux inconnu. Trois journées durant, l'on ne revit plus ni l'un, ni l'autre. Après quoi, le téméraire jeune homme se retrouva dans un palais de Venise en compa- gnie du Vénitien. Celui-ci lui révéla son secret. Chaque année, il venait en Alsace, dans la vallée de la Doller, au bord du Lachtelweiher, en observance des antiques consignes d'un très vieux grimoire. Selon elles, au prin- temps, il pouvait venir ramasser ici des pierres magiques, capables de se muer en or pur. C'était ainsi qu'il avait amassé sa fortune...

LA JEUNE FILLE DE LANGENFELD

Un vieux paysan du lieu-dit Langenfeld, non loin du village de Kirchberg, avait une fille fort jolie. Las, le bonhomme était pauvre, ne vivant que du produit de ses maigres champs de montagne. Mais ce qui devait arrivera arriva. Un jeune noble très riche, fils du seigneur de Kirchberg, tomba follement amoureux de la belle. Celle-ci l'avait séduit sans même l'avoir su, alors qu'un soir de fenaison, vêtue de sa courte jupette fleurie, de sa blouse échancrée et de ses longs bas de coton blanc, et chaussée de sabots, elle chantait à ravir une complainte d'amour. Ses blonds cheveux tressées, ses yeux et ses lèvres roses firent le reste. Le jeune seigneur s'en fut demander la main de la belle au vieux paysan son père. Las, celui-ci l'éconduisit doucement, mais non sans fermeté. A ses yeux, la pauvreté de sa fille, jointe à sa condition roturière de paysanne, rendaient bien évidemment impossible tout projet d'union avec le jeune homme. Et les laisser s'aimer en dehors d'épousailles eut été impensable pour l'honneur de la demoiselle... Le coeur triste et serré, le jeune seigneur dût choisir de partir en exil pour oublier sa belle. Quant à la jolie petite paysanne, elle qui aimait tendrement en retour ce jeune homme, elle fut désespérée de chagrin. Un jour, de bon matin, elle disparut au bord du Lachtelweiher et nul ne la revit jamais.

Le temps passa. Et puis, longtemps après ce malheur, l'héritier du sire de Kirchberg rentra au château sans avoir pu oublier son amour de jeunesse. Or, son père convoitait la dot d'une très riche damoiselle qu'il voulait imposer en mariage à son fils. Bien qu'ayant encore le coeur brisé de peine, le jeune homme s'inclina.

La veille des noces, les deux fiancés cheminaient tout en devisant près du lac Lachtelweiher, quand la jeune promise aperçut, flottant sur l'eau, de merveilleuses fleurs blanches et nacrées de nénuphars. Elle les désira aussitôt pour fleurir sa cérémonie nuptiale. Lui, galant, se proposa pour aller les cueillir. Mais alors qu'il pénétrait dans l'eau jusqu'à lors peu profonde, les fleurs aquatiques semblèrent s'éloigner des berges au fur et à mesure qu'il avançait ! Dans le même temps, le fiancé entendait sourdre du lac le chant d'amour de la petite paysanne disparue. Le même chant qui l'avait tant séduit naguère. La voix cristalline l'attirait inconsciemment vers les eaux profondes où s'arrêtèrent enfin les beaux nénuphars. Alors, parmi le fleurs flottantes, il vit apparaître le souriant visage de sa fidèle aimée. S'élançant vers elle, il disparut subitement dans les eaux. Jamais on ne le retrouva. L'on dit depuis ce drame, qu'une fée ravissante à la chevelure d'or chante ici les nuits d'été, promettant de recevoir au sein du lac quiconque recherche la consolation du coeur...

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